Les fondamentaux du métier d’EJE
Fait à l'IRTS de Montrouge octobre 2013 "Pour reprendre le titre d’un chapitre de l’ouvrage que nous avons écrit D. Auzou-Riandey et moi-même : « Les enjeux du métier d’EJE », l’enfant est au « cœur du métier » Jusqu’où remonter, ou plutôt, jusqu’à quelles sources aller, pour identifier les idées pédagogiques fondamentales du métier d’EJE. ? Dans la mesure où les pédagogies se basent sur des idées philosophiques, on peut remonter jusqu’à l’humanisme, où c’est l‘homme créateur qui est au centre de toute chose. L’enfant est donc un sujet et non objet ! L’EJE n’est pas au service d’une société pour y adapter les enfants, elle est au service des enfants pour que par leur éducation, ceux-ci sachent prendre plus tard, leurs responsabilités. Nous ne sommes pas dans une société traditionnelle où la reconduction des valeurs fait partie de sa survie, nous sommes, depuis la Renaissance, dans une société où ceux qui la composent la font évoluer. C’est ainsi que dans la lignée de l’Humanisme du 16e siècle, les différents pédagogues, à commencer par Comenius ou philosophes avec Rousseau ont lancé les éléments fondamentaux de l’éducation moderne. Ils ont voulu que le résultat des principes éducatif soit un être créateur, libre, constructeur de sa destinée et responsable dans la société qui l’a accueilli. C’est sur ce rêve… en quelque sorte, que se sont élaborée les pédagogies qui sont la référence du métier d’éducateur de jeunes enfants. De quoi s’agit-il ? Je vais synthétiser avec cette expression : « entre soins et éducation » Une référence fondamentale vient de Comenius (pédagogue tchèque du XVIIe siècle). Il compare l’enfant à la graine, qui a en elle tout le connaissable:« Il est évident que l'Homme, dès sa naissance est apte à acquérir toute la science des choses. Il suffit, comme le jardinier, de lui préparer un contexte dans lequel l'enfant va se développer par lui-même. Cette idée sera reprise par J.J. Rousseau, R. Steiner, M. Montessori avec ce qu’elle va appeler « l’ambiance. » Celle-ci se prépare, s’anticipe, s’organise, se réfléchi afin que chaque enfant puisse trouver de quoi se connaître et découvrir son environnement, découvrir son propre fonctionnement et celui de son entourage. Pour ensuite prendre sa place avec ses particularités tout en respectant les autres. Par quoi commence ce jardiner-pédagogue ? Il regarde, écoute, il observe ! l’éducateur n’est pas pressé, il prend son temps car il a confiance. Notre attitude constante n’est elle pas de rappeler qui est l’enfant, quels sont ses besoin, ses possibilités, ses richesses. Que ce soit aux parents ou même à l’équipe. De rappeler que « l’enfant n’est pas un vase qu’on emplit, mais un feu qu’on allume » Montaigne l'a dit il y a quelques siècles, sûrement que dans quelques siècles on le dira encore ! Nous sommes les porte-parole de l’enfant. L’éducateur ouvre son champ de vision non seulement vers l’enfant, mais vers son milieu. Car un autre élément fait partie des fondamentaux de la pédagogie c’est la référence à la nature. Elle est chère à Comenius, Pestalozzi, Fröbel avec son jardin d’enfant et fondamentale chez Steiner. "Il y a entre la nature et l'esprit humain un parallélisme qui entraîne le processus éducatif. Il s'agit de l'ordre des choses. Tout ce qui se trouve dans la Nature se trouve déjà dans l'homme. Lire la nature est apprendre à se lire." Nous dit Comenius Car tout enfant, comme la plante qui est au centre de courants cosmiques, est au centre de diverses relations humaines. Cette notion de nature a une double face : Se servir de la nature pour éduquer. Comme base d’observation de la vie et aussi d’apprentissage du respect de la vie. L’émerveillement qu'elle provoque est à la base de l’éducation aux valeurs. L’autre face est la notion de nature de l’enfant qu’on ne peut que respecter. Par sagesse car nous savons que si l’on ne prend pas en considération le stade, les besoins de l’enfant, celui-ci va avoir des déviances aussi bien morales que physiques. M. Montessori nous l’a bien expliqué avec son besoin d’ordre chez l’enfant, R. Steiner aussi avec les conséquences plus tard sur les maladies d’adultes lorsque l’enfant est « forcé ». E. Pikler aussi dans sa relation attentive et respectueuse. Ce respect commence par la mise en place d’un contexte rassurant, confortable. C’est la dimension « soin » de notre fonction. La dimension accueil. Nous savons que l’enfant est porté par des « périodes sensibles », par des intérêts, par son envie intrinsèque d’agir, d’être acteur. Qu’il expérimente non pas pour produire mais pour se construire. Dans cette activité chère à tous les pédagogues il use de « la tête le cœur la main » pour reprendre une expression de J. Pestalozzi. Nous savons que par le jeu il est là dans sa globalité. Le jeu libre, (comme s’il pouvait en être autrement) nous en connaissons la valeur autant pour que l’enfant se dépasse que pour les apprentissages qui vont suivre. A ce moment ce n’est plus du conditionnement mais une acte volontaire proche de la liberté. Un autre élément qui entre en jeu c’est l’art, l’art en éducation, (J’en profite pour rappeler que la pédagogie est de l’art.). Cher à M. Montessori et R. Steiner. Cher à Magaluzzi, en Italie à Reggio Emilia, actuellement, l’enfant est créateur par l’intermédiaire de différents matériaux, qui là aussi élèvent l’enfant. Il y a d’autres dimensions que la pédagogie dans le métier d’EJE, des démarches plus récentes que les références que j’ai données. C’est la relation avec le milieu de l’enfant pour lequel je pense que pratiquement tout ce que j’ai énumérer pourrait servir. Je voudrai terminer en disant que le métier s’est quelque fois laissé séduire par exemple la sociologie, ou la psychanalyse et même la psychologie, et pourquoi pas certains arguments de pédagogues, mais en faisant le parcours sur le siècle dernier, le métier d’EJE a su garder ses essentiels envers et contre tout. Pourquoi avons nous gardé notre identité lorsque nous avons du trouver du travail hors des jardins d’enfants dans tous les secteurs, des crèches, des foyers de l’enfance, les services de pédiatrie, les enfants déficients moteurs mentaux. Parce que c’est l’enfant que nous avons en face de nous qui est important. Dans sa réalité et que dans celle-ci, si l’on sait être humble et vrai, il y a les réponses. |