Le sommeil |
Comment aider des enfants âgés de 18 à 24 mois à avoir un sommeil de qualité au sein d’un multi-accueil.
Une scène dans le multi-accueil : Les enfants vont à la sieste après le repas qui se déroule entre 11h 30 et 12h environ. Ils sortent directement dans la section où se trouve une structure motrice fixe. Patrick 21 mois et Myriam 23 mois courent jusqu'à elle. Patrick monte dessus et crie en levant les bras. John, 23 mois, se retourne et fait comme Patrick. Les deux garçons rient. Une adulte leur dit « Il est interdit de crier dans la section, ça fait mal aux oreilles ». Patrick et John descendent de la structure et vont courir d’un bout à l’autre de la section. Yannick, 24 mois, les suit en courant. Peu après Patrick et Yannick s’endorment après environ 45 minutes et ce, malgré un accompagnement. Ils bougent beaucoup, se retournent, jouent avec leur doudou. Pourquoi les enfants sont-ils si excités ? Si avant le repas, les enfants qui n’ont rien mangé depuis plusieurs heures sont en (légère) hypoglycémie, après le repas les « batteries sont rechargées » et ils ont besoin d’évacuer cette énergie en plus. Aussi, le repas dure en moyenne 30 minutes ; ils sont donc assis tous ce temps sachant qu’un enfant âgés entre 18 et 24 mois a besoin de bouger, d’explorer ses capacités motrices sous diverses formes. Suite à cette hypothèse, l’idée d’instaurer un temps calme après le repas s’est mis en place afin d’apaiser les enfants, d’atténuer les tensions et de les aider à trouver le sommeil. L’importance du sommeil chez l’enfant Le sommeil est constitué de 5 stades : l’endormissement, le sommeil léger, le sommeil profond (sécrétion de l’hormone de croissance, la prolactine, et réparation des tissus usés), le sommeil très profond et le sommeil paradoxal (mémorisation et organisation des informations). L’ensemble de ces stades permet de « récupérer » à condition que ce soit en qualité et en quantité suffisante. L’instauration d’un temps calme avant de dormir canalise leur énergie, provoque le sommeil rapidement et sereinement ; le calme de l’environnement étant le premier facteur d’endormissement. Forcer un enfant à dormir au-delà de ses besoins peut entrainer une résistance (phobie du sommeil) et créer un état de tension non propice à l’endormissement. L’enfant dort mal et surtout il dort parce que c’est ce que nous souhaitons. Afin de garantir un environnement calme, je souhaite d’éviter de crier sur un enfant, cela engendre un état de tension que l’enfant revit dans son sommeil au cours des rêves mais cela peut aussi perturber son endormissement.[1] L’idée de faire un temps calme avec une musique douce permet d’apaiser enfant comme adulte et donc éviter les éventuelles tensions nerveuses. Ce rituel d’apaisement peut s’accompagner de câlin ou d’un bercement qui donne le sentiment d’être contenu et accompagné et qui permet de donner à l’enfant un sentiment de sécurité psychique et physique. Je mets également un accent sur le silence comme facteur d’endormissement une fois dans le dortoir, afin que l’enfant puisse se concentrer sur lui-même et écouter son besoin de repos et l’assouvir. Je trouve important de respecter le rythme de l’enfant : c’est lui qui va réguler son train de vie. « Le rythme fait partie intégrante de l’individu ; c’est un caractère qui lui est propre au même titre que la forme de son corps. »[2] Changer de rythme met l’individu dans un état de souffrance et d’insécurité par la perte des repères spatio-temporel et affectifs. D’où l’importance d’avoir une continuité et des repères pour l’enfant. En tant qu’éducateur ou en tant que parent, nous devons accompagner l’enfant et l’aider à trouver son propre rythme. Cependant, en collectivité, il est difficile de le respecter pleinement puisque le coucher échelonné est impossible … C’est pourquoi la section est aménagée avec des « coins calmes » afin de permettre à l’enfant de se reposer quand il le veut. Favoriser la relaxation de l’enfant avant le coucher par un rituel apaisant qui lui correspond comme des chansons douces, des histoires, le bercement est nécessaire. J’ai testé le temps calme sur une durée d’une semaine afin de commencer à instaurer un rituel. Une fois arrivée dans la section, j’ai mis de la musique. Au départ je comptais inviter les enfants à se mettre sur des tapis mais en réfléchissant, j’ai préféré leur laisser le libre choix, sachant que la musique les apaiserait même s’ils jouent. De plus, si nous forçons un enfant à rester assis sur un tapis alors qu’il veut jouer nous risquons de le rendre nerveux par la frustration et donc rompre l’idée d’apaisement. Cette semaine d’essai a été un succès, l’endormissement fut plus serein. Accueillis tant par les enfants que par les professionnels, l’objectif de les apaiser, de les préparer au sommeil, avant de dormir a été atteint. Mais, le lecteur de C.D. étant en panne fréquemment, nous avons fait un temps d’histoire collective en remplacement. Par la suite, j’ai constaté que les professionnels n’utilisaient pas la musique mais plutôt le temps d’histoire. L’idéal est que chacun se sente à l’aise dans la pratique d’un temps calme. Le tout afin d’amener l’enfant à son autonomie à travers cette pratique en respectant et en repérant son de l’enfant (se coucher seul et écouter son propre besoin et non celui d’autrui). La grande difficulté, à mon avis, réside principalement dans le fait que l’on oblige les enfants à dormir à une heure précise. Or, il est important de respecter un rythme qui lui convient et non qui convient à l’adulte car l’enfant dort pour nous faire plaisir et non pour répondre à son propre besoin. « L’enfant doit avoir le droit de dormir quand il a sommeil, de s’éveiller quand il a fini de dormir et de se lever quand il le veut »[3]. Cette difficulté est celle de la collectivité, comme dit Maria Montessori : « La vie en commun est presque impossible si l’on n’a pas recours à certaines adaptations »[4]. Johanna de Gouveia étudiante EJE Bibliographie Dolto Françoise (2009), « Les étapes majeures de l’enfance », Gallimard, 1994 Montessori Maria (2006), « L’enfant », Paris : Desclée de Brouwer, Groupe Artège, 1936 Filliozat Isabelle (2011), « J’ai tout essayé », Paris : Jean-Claude Lattès, 2011 Fontaine Anne-Marie (2011), « L’observation professionnelle des jeunes enfants », Paris : Philippe Duval, 2011 « A la rencontre de Maria Montessori », EJE-journal n°26 décembre 2010/janvier 2011 « Les invariants de Célestin Freinet » : www.icem-pedagogie-freinet.org [1] Filliozat Isabelle, « J’ai tout essayé ! » (2011) – Un enfant, c’est plus compliqué qu’une plante verte, p 25 [2] Montessori Maria, « L’enfant » (2006) – Le rythme, p 84 [3] Montessori Maria, « L’enfant » (2006) – Dormir, p 68 [4] Montessori Maria, « L’enfant » (2006) – Dormir, p 65 . |