Encore ce matin à la radio une ministre s'est référé aux neurosciences pour justifier l'expérience dans l'apprentissage. Pourquoi est-il nécessaire de s'appuyer une fois de plus sur les neurosciences pour affirmer une argumentation évidente pour les personnes concernées ? Et même si l’émission avait pour but de valoriser les centre d’apprentissage technique, ce qui est fabuleux, j'ai été déçue qu'à nouveau on nous donne cette référence. Effectivement j'ai pensé: "ce n'est pas nouveau! " Pour remonter loin, Aristote m'est venu à l'esprit: "Pour apprendre la harpe il faut en jouer" et bien d'autres choses encore sur "la praxis". Et tous les pédagogues des Méthodes Actives qui tout au long des siècles ont parlé de l'importance de l'expérience ? Entre autre Coménius, ce pédagogue tchèque du 17ième siècle qui nous dit: "Des connaissances acquises par l'expérience, fonctionnellement, tendent spontanément à s'organiser de telle sorte qu'il sera possible de les coordonner selon des structures logiques et verbales, alors qu'un enseignement formel avant la compréhension amène au verbalisme." Ce n'est ni le premier ni le dernier à mettre l'expérience au centre de l'apprentissage. Alors à l'Education Nationale on ne sait pas cela ? Ce qui n'empêche que certaines enfants savent passer par l'abstraction pour apprendre, mais pas les petits. Mais il y a autre chose qui me parait gênant, cette référence est devenue un véritable engouement que je perçoit comme étant prégnant. C'en est redondant, que ce soit pour justifier la bienveillance vis à vis des enfants et la gestion de ses émotions, pour expliquer que le cerveau de l'enfant est exploitable au delà de ce que nous croyons et aussi pour confirmer la démarche politique basée sur l'égalité des chances. Comme si nous étions le "bon Dieu" qui gère la chance des humains et comme si l'égalité ne se prêtait pas à une confusion du style "tous à l'université" comme je l'ai entendu dire par des gens qui font partie des intellectuels. Ce ne sont pas les neurosciences que je remets en cause, c'est une science extraordinaire, mais c'est la façon dont on s'en sert. On a trop tendance à l'utiliser pour une meilleure rentabilité. L'enfant n'est pas un objet dont on doit exploiter les caractéristiques comme on le fait malheureusement pour la nature. L'éducation et l'enseignement ont une référence qui s'appelle la PÉDAGOGIE, qui se rattache depuis quelques siècles à un certain humanisme. L'enfant y est considéré comme étant le premier acteur de son développement, mais pas seulement avec son cerveau, mais avec toute sa personne, je dirais même plus tout ce qui fait sa personnalité, son histoire, le contexte dans lequel il vit. C'est par la qualité de l'environnement que nous construisons, inventons pour les enfants que chacun fait la synthèse entre toutes les données humaines qui le composent: physiologiques, sociales, intellectuelles et spirituelles. Ceci pour qu'ils puissent découvrir, affirmer et construire leur propre chemin qui a un sens pour eux-mêmes qu'ils partageront avec les autres en références aux valeurs qu'ils auront choisies. Toutes les époques ont leur mode ou leur leitmotiv. Durant celle où j'ai fais ma formation c'était la "stimulation sensorielle", qui s'est heureusement transformée en éveil sensoriel qui s'est peut à peu intégré dans une ensemble plus large : l'enfant est une personne. Ce n'est pas facile de garder du recul parmi toutes ces sollicitations et ces répétitions surtout lorsque ce sont des personnes respectables et responsables qui les induisent. Mais si ne pas être dans "l'air du temps"n'est pas confortable c'est tellement enrichissant. Garder confiance en soi, continuer à garder sa ligne personnelle, écouter les contradicteurs, n'est pas là une liberté ? Les enfants le valent bien. Petite biblio du moment: "l'enfant n'est pas une clé USB" Philippe Meirieu et Vers une nouvelle guerre scolaire" ed. La découverte, Philippe Champy |
1 Commentaire
AgnesLC
10/9/2019 08:14:06 pm
Je rajouterai une question: pourquoi avons nous besoin d’ une caution, d une justification , qu’ apporte certes, les neurosciences... ? De quoi avons nous besoin pour simplement exprimer notre point de vue ? Et être entendu... parlons de notre vécu , de ce que nous apprenons de ce que nous vivons, simplement ...
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